Porosités du hors-scène et du hors-champ au théâtre : zones liminaires

DOI : 10.56078/motifs.421

Résumé

Si le mot « hors-scène » est utilisé de manière empirique pour désigner des espaces, des personnages ou des épisodes invisibles, il n’appartient pas au vocabulaire technique du théâtre et il est parfois remplacé, dans l’usage, par des mots empruntés à d’autres champs artistiques comme « off », « hors-cadre » ou « hors-champ ». Il se construit cependant selon des modalités qui lui sont propres, et doit être distingué de ces notions voisines. Je proposerai tout d’abord une brève définition du hors-scène théâtral, avant d’interroger dans un second temps ses porosités avec le hors-champ cinématographique. Il s’agira ainsi d’esquisser une typologie de cas de hors-scène contemporains caractérisés par des emprunts au cinéma (procédés de montage et/ou de cadrage), en mettant plus particulièrement en lumière des usages de la vidéo qui contribuent à la création d’une zone liminaire – entre visible et invisible – de la scène.

Plan

Texte

Les usages du mot « hors-scène » sont fluctuants : il est employé de manière empirique pour désigner des espaces, des personnages ou des épisodes invisibles mais il n’appartient pas au vocabulaire technique du théâtre et il est souvent remplacé, dans l’usage qu’en font les artistes1, par des termes empruntés à d’autres champs artistiques comme « off », « hors-cadre » ou « hors-champ ». On peut le situer à la croisée du hors-champ et du non-dit : comme le hors-champ, il travaille les marges de l’image théâtrale, et comme le non-dit, il peut être analysé à l’échelle du texte même, envisagé du point de vue de son devenir scénique2. Il se construit cependant selon des modalités qui lui sont propres, et il doit être distingué de ces notions voisines.

Je proposerai tout d’abord une brève définition du hors-scène théâtral, avant d’interroger dans un second temps ses porosités avec le hors-champ cinématographique. Il s’agira ainsi d’élaborer une typologie de plusieurs cas de hors-scène contemporains caractérisés par des emprunts au cinéma. Dans cette deuxième partie, seront abordés des textes de théâtre dans lesquels le cadrage du point de vue s’inspire du hors-champ cinématographique, des spectacles faisant un usage cinématographique du montage et de ses intermittences temporelles, au moyen de la lumière et/ou d’outils scénographiques, et enfin des usages scéniques de la vidéo et des écrans intégrant la mise en scène d’une zone liminaire du plateau.

Je me focaliserai plus particulièrement sur ces usages singuliers de la vidéo. En effet, au-delà de la simple analogie entre hors-scène et hors-champ que l’on peut identifier dans certains effets de cadrage ou de montage opérés par la mise en scène, la matérialisation la plus concrète et la plus troublante du hors-champ au théâtre me paraît être cette mise en scène d’une zone liminaire, fondée sur une reconfiguration permanente des limites du visible et de l’invisible. S’il est important de bien distinguer le hors-scène et le hors-champ, les deux notions ont des points de contact, des porosités – et cette zone liminaire qui trouble le regard et crée une perception autre du spectacle en est une.

Brève définition du hors-scène théâtral

Hors-scène : le mot peut sembler d’emblée paradoxal, puisque le théâtre a besoin pour exister du lieu scénique, qu’il soit ou non matérialisé par une architecture. Ne peut-on pas considérer que tout ce qui se situe au-delà des limites de la scène procède nécessairement de cette dernière ? L’existence même d’un mot pour désigner cet envers de la scène invite pourtant à opérer la distinction, et à tenter l’exploration de la périphérie invisible du plateau.

D’un point de vue historique, comme le note Arnaud Rykner, « la question [du hors-scène] ne se pose guère avant le XVIIIe, voire la fin du XIXe siècle3 » et gagne en ampleur au XXe siècle. C’est en effet le théâtre naturaliste, dans la continuité du drame bourgeois de Diderot, qui donne de l’importance à l’extérieur : « la pression du milieu et de son avatar le décor déplace l’origine de l’action sur ses marges4 ». L’apparition de la notion est donc liée à des mutations historiques et esthétiques qui ne seront pas développées dans cette étude5, mutations dont on peut dire qu’elles remettent en jeu les modalités de la relation entre le théâtre et le monde.

Aujourd’hui, à la différence du hors-champ, le hors-scène est absent des dictionnaires de langue française, signe d’un usage peu courant et surtout très spécifique. Plusieurs professionnels du spectacle rencontrés au cours de mes recherches ont déclaré ne jamais utiliser ce mot. Pourtant, ils le comprenaient de manière intuitive tout en lui prêtant des significations très diverses. Le mot est référencé dans le Dictionnaire du théâtre6 de Patrice Pavis : le hors-scène y est présenté comme interne à la sphère de la fiction, puisqu’il est distingué des coulisses qui renvoient à la réalité concrète du lieu théâtral. Il est indiqué que « le statut du hors-scène varie selon le degré de réalité que le milieu scénique prétend avoir7 », ce qui souligne qu’il dépend de choix esthétiques. Enfin, l’auteur aborde le hors-scène par le biais des procédés techniques qui permettent son avènement. Cette définition aborde donc le hors-scène par le détour de ce qu’il suggère (espace périphérique fictionnel ou réel) ou de ce qui le suggère (teichoscopie8, son, éclairage). Elle a l’intérêt de mettre en lumière le double ancrage, dramaturgique et scénographique, de la notion – double ancrage qui rend sa saisie plus complexe car elle le fait osciller entre deux types d’invisibilités, l’une procédant du texte, l’autre issue de la matérialité de la représentation.

C’est dans le champ de la dramaturgie que l’on trouve le plus de propositions de définition du hors-scène. Certains travaux issus de l’approche sémiotique du théâtre comme Lire le théâtre I d’Anne Ubersfeld9 et Le spectacle du discours de Michael Issacharoff10 l’abordent en tant que part invisible de l’espace dramatique/fictionnel, et l’analyse dramaturgique reste le prisme dominant du numéro de la revue Coulisses11 consacré au hors-scène. Arnaud Rykner a développé dans ses travaux12 une pensée du hors-scène à laquelle cette recherche doit beaucoup, en envisageant également la notion au prisme de la dramaturgie, à la croisée de l’indicible, de l’invisible et de l’irreprésentable, et en proposant de retourner l’opposition du hors-scène et de la scène : pour lui, la scène échappe toujours au visible car elle « opère une sorte de prélèvement dans le tissu de la fiction13 ». Pour Arnaud Rykner, le hors-scène peut reposer sur des choix de mise en scène mais « [q]uoi qu’il en soit, en l’absence de visibilité, le hors-scène existe principalement dans l’ordre verbal14. » Dans cette perspective, le hors-scène apparaît comme une modalité théâtrale du non-dit.

Cette prégnance de l’approche dramaturgique s’explique sans doute par le fait que le mot « hors-scène » soit absent du vocabulaire technique du théâtre, qui dispose de tout un éventail terminologique pour désigner la périphérie de la scène : arrière-scène, coulisses, dessus et dessous de scène, découvertes15. Contrairement au hors-champ cinématographique, qui relève de la technique, le hors-scène est forgé à partir d’une vision paradigmatique de la scène, éloignée des conditions concrètes de la représentation, qui procède du phénomène décrit par Bernard Dort dans l’article « Le texte et la scène : pour une nouvelle alliance » :

La scène est moins une réalité matérielle qui viendrait s’ajouter au texte qu’un concept. Et, comme tel, elle n’intervient pas seulement une fois ce texte fixé : elle entre dans la composition même du texte. Le concept de scène ne se situe pas qu’en aval du texte : il intervient d’abord en amont. La scène est l’une des conditions de l’écriture du texte16.

Dans cette perspective dramaturgique la scène n’est pas un lieu, mais un « concept17 », invitant à penser le hors-scène de manière abstraite et à « décoll[er] [la scène] du plateau18 », selon l’injonction d’Arnaud Rykner.

Certains considèrent cependant le hors-scène d’un point de vue scénographique, même si cette approche n’est pas majoritaire ; c’est le cas de John Russell Brown dans l’article « On-stage action and off-stage space19 ». Enfin, d’autres emploient d’autres mots, que l’on peut considérer comme des avatars lexicaux du hors-scène, pour désigner la partie non visible de l’espace théâtral et son au-delà : c’est « l’autour20 » que Jean-Pierre Faye oppose à « l’ici » de la scène, le « cadre mental21 » que Pierre Francastel distingue du « lieu matériel22 » du théâtre, ou encore le « hors-champ23 » envisagé par Jean-Christophe Bailly comme

[…] l’entourage invisible immédiat de la scène (tout ce que les techniciens désignent comme ce qui n’est pas « à vue », soit les coulisses, les cintres, les dessous, etc…), mais […] aussi, et sans aucune métaphore, tout ce qui n’est pas là, […] « le monde24 ».

L’oscillation terminologique est en elle-même signifiante ; j’ai tenu compte de ces avatars lexicaux, en postulant qu’ils se rattachent à la notion de hors-scène dans la mesure où il s’agit de propositions pour désigner la part invisible de la représentation, par opposition à l’espace scénique. Cette zone invisible est à géométrie variable, puisqu’elle est tantôt pensée comme la périphérie immédiate du plateau, tantôt étendue au monde entier – mais c’est précisément parce que le traitement de « l’espace liminaire25 » de la scène, c’est-à-dire « la séparation […] entre la scène et la salle26 » et « entre la salle et la coulisse27 » conditionne un rapport au monde. Face à une tradition majoritairement dramaturgique de la conceptualisation du hors-scène, il importe donc de rappeler le rôle déterminant de la scénographie, qui consiste précisément à dessiner ou à brouiller les limites du plateau ; j’y reviendrai dans le deuxième temps de cette étude.

Hors-scène / hors-champ

Le mot « hors-champ » est souvent employé comme un synonyme du hors-scène, alors qu’il s’inscrit dans un champ disciplinaire distinct. La notion a en effet suscité un débat théorique au sein des études cinématographiques et soulève des questionnements esthétiques et ontologiques, mettant en jeu la nature même du cinéma. Alors que le hors-scène est resté inexploré des études théâtrales avant le début des années 2000, les études cinématographiques se sont attachées dès le début des années 1960 à définir le hors-champ. La métaphore de la couture apparaît aux deux extrémités chronologiques de ces propositions théoriques, chez André Bazin qui dans l’article « Montage interdit » invite à se conformer au modèle de la « robe sans couture de la réalité », et chez Louis Seguin, qui récuse l’existence du hors-champ pour ne prendre en considération que l’image et « l’ourlet » qui lui est consubstantiel : pour lui « l’ailleurs n’est pas rejeté au-delà du cadre mais […] il est un repli de l’image et […] on ne peut pas l’en dégager28 ».

Contrairement au hors-scène, le hors-champ a donc une définition technique qui, au premier abord, facilite son appréhension. Il désigne ce qui se situe à l’extérieur du plan tout en étant intégré à la fiction grâce à différents outils de suggestion. Ainsi, dans Le vocabulaire du cinéma, Marie-Thérèse Journot indique que le hors-cadre désigne « la partie du support qui s’étend matériellement autour de l’image ». Lorsque ce versant invisible de l’image est intégré à l’œuvre par la diégèse on peut employer le terme de hors-champ, mot qui désigne alors « l’espace imaginaire en trois dimensions suggéré et caché par le cadre29. » Le hors-champ dépendrait alors d’un effet de continuité créé par des outils visuels, sonores et narratifs, faisant apparaître l’image comme un fragment d’un ensemble plus vaste. Cette conception a été remise en question par la suite au nom d’une autonomisation de l’image cinématographique qui suppose une complexification du rapport au monde : sans être rompus, les liens entre l’image et le monde sont distendus, ou prennent de nouveaux chemins. Tenter l’exploration chronologique des théories du hors-champ pourrait bien éclairer certaines évolutions d’un hors-scène contemporain qui ne semble plus cantonné dans les espaces périphériques de la scène, dans la continuité de l’espace représenté.

Le hors-champ au cinéma dépend principalement de deux actions : le cadrage et la coupe. Ces deux opérations sont fréquemment associées dans les typologies existantes et déterminent des esthétiques, mais aussi des modes de relation au monde de nature philosophique, éthique et politique. Le premier à s’y être intéressé est André Bazin, défenseur d’une nécessaire continuité du hors-champ avec le champ, devant être pensée sur le modèle de la « robe sans couture de la réalité ». Le titre de l’article « Montage interdit », dans lequel il développe cette théorie, est éloquent : au nom de la mimésis, il s’agit de préserver une continuité qui serait le propre du cinéma, par opposition au théâtre30 et à la peinture. En effet dans « Peinture et cinéma31 » et dans « Ontologie de l’image photographique32 » il distingue le cadre centripète qui dirige le regard sur l’image picturale et l’écran centrifuge considéré comme un « cache » donnant un aperçu d’un ensemble plus vaste. Pour lui, lorsqu’un personnage sort de scène, « nous admettons qu’il échappe au champ visuel, mais il continue d’exister identique à lui-même en un autre point du décor, qui nous est caché33 ». Le point de vue offert par le cadre organise ici un rapport au monde, l’image cinématographique étant prélevée dans le réel.

Sur les bases posées par André Bazin, Noël Burch a proposé une taxinomie des différents procédés du hors-champ dans l’ouvrage Praxis du cinéma (1969), dont il a ensuite récusé une partie du contenu. Ainsi, dans le chapitre « Nana et les deux espaces », il analyse le film de Renoir comme le parangon de l’utilisation du hors-champ et il montre que celui-ci met en œuvre différents degrés de perception. Pascal Bonitzer a poursuivi la théorisation du hors-champ cinématographique en s’appuyant en partie sur les travaux de Bazin et de Burch, dans trois ouvrages principaux : l’article « Des hors-champs » dans Le regard et la voix (1976), et les essais Le champ aveugle (1982) et Peinture et cinéma : décadrages (1985). L’article « Des hors-champs » est un remaniement d’un texte publié dans un numéro spécial des Cahiers du cinéma en 1971-72 : « Hors-champ (un espace en défaut34) ». L’auteur y prend position contre André Bazin qui a selon lui ignoré la discontinuité, alors que Burch a tenu compte du fait qu’« au cinéma, de plusieurs façons, on coupe35 ». Au détour de ses analyses il esquisse une comparaison entre hors-scène et hors-champ qui souligne la mobilité du point de vue proposé au spectateur de cinéma, par opposition à celui du spectateur de théâtre :

Au théâtre l’espace off l’est, off, sans recours. Au cinéma au contraire, il entre dans la dimension du temps et du mouvement, le hors-champ (…) devient champ, et inversement, par le jeu du champ-contrechamp ou du panoramique, voire de la bande sonore. Ce jeu, ce devenir-champ du hors-champ et vice versa légitimerait le terme de dialectique proposé par Burch36.

Bonitzer met donc l’accent sur la plasticité de l’espace cinématographique – on pourrait néanmoins lui objecter que l’espace théâtral peut être lui aussi « fluide, plastique, animé37 », et que la scénographie s’est attachée au cours du XXe siècle à « [a]ssouplir l’espace, le rendre flexible, mobile, voire fluide38 ». Pour Pascal Bonitzer, le mode d’articulation du champ et du hors-champ a des conséquences esthétiques mais aussi, du moins dans la première version de l’article, politiques. Sur le plan politique il prend clairement parti pour le cinéma qui divise, celui qui brise la continuité39 – selon lui plus à même de rendre compte de la lutte des classes et de l’alimenter. Ces conclusions sont ensuite déplacées du politique vers l’esthétique dans Le regard et la voix, où le marxisme laisse place à l’identification d’un usage autre du son au cinéma. Le rôle du son dans la construction du hors-champ est aussi une piste que suivra Deleuze, en empruntant d’autres voies.

La publication des deux volumes de L’image-mouvement (1983) et de L’image-temps (1985) marque un tournant important dans la théorisation du hors-champ cinématographique, puisque son existence même a été remise en question. Cette rupture a lieu plus précisément entre les deux volumes des écrits sur le cinéma de Gilles Deleuze, qui dans un premier temps reconnaît l’existence de « deux aspects très différents du hors-champ dont chacun renvoie à un mode de cadrage40. » Il distingue un hors-champ relatif et un hors-champ absolu, le faux raccord étant ensuite analysé comme l’un des procédés par excellence qui créent ce deuxième type de hors-champ. Ces analyses, développées dans L’image-mouvement, valent selon lui uniquement pour une période historique antérieure aux années 1940. Avec l’apparition du néo-réalisme italien, puis la Nouvelle Vague et le cinéma d’Ozu, l’image-temps s’affirmerait et entraînerait la disparition du hors-champ, conséquence directe de ce « nouveau régime » de l’image :

[L]es images, les séquences ne s’enchaînent plus par coupures rationnelles, qui terminent la première ou commencent la seconde, mais se ré-enchaînent sur des coupures irrationnelles, qui n’appartiennent plus à aucune des deux et valent pour elles-mêmes (interstices). Les coupures irrationnelles ont donc une valeur disjonctive, et non plus conjonctive41.

La césure historique proposée par Deleuze a été nuancée par Jacques Rancière, qui montre dans La Fable cinématographique que « [l]’opposition de l’image-mouvement et de l’image-temps est […] une rupture fictive42. » Pour lui, « [l]eur rapport est bien plutôt une spirale infinie43 », une « dialectique ». Plus que la question de la périodisation, cette notion de coupure irrationnelle nous intéresse car elle semble pouvoir être appliquée aux spectacles qui seront abordés à la fin de cette étude – ceux qui créent une zone liminaire entre scène et hors-scène. Deleuze souligne par ailleurs la plasticité de l’image-temps, désormais en mesure de déplacer constamment les limites du visible et de l’invisible :

Les nouvelles images n’ont plus d’extériorité (hors-champ), pas plus qu’elles ne s’intériorisent dans un tout : elles ont plutôt un endroit et un envers, reversibles et non-superposables, comme un pouvoir de se retourner sur elles-mêmes. Elles sont l’objet d’une réorganisation perpétuelle où une nouvelle image peut naître de n’importe quel point de l’image précédente44.

Malgré l’affirmation de la disparition du hors-champ, quelque chose persiste à s’opposer au visible : un « envers » résiste, et nous donne à penser que l’apparente disparition pourrait être une transformation. Car ce que Deleuze met en avant, c’est une manière autre d’articuler le visible et l’invisible, et non la disparition de toute articulation. La réflexion sur le hors-champ cinématographique conduit ainsi à décentrer le regard pour observer les bords, les limites de l’image.

Louis Seguin, en prenant position de manière radicale contre André Bazin et en récusant l’existence même du hors-champ dans l’ouvrage L’espace du cinéma, apporte un nouvel élément au débat théorique : sa pensée se construit contre toutes les théories du hors-champ et il emprunte à Derrida la notion d’ourlet, ce qui marque un retour de la métaphore de la couture. En voulant faire table rase du hors-champ, il semble cependant oublier que les interrogations de ceux qui s’y sont intéressés n’avaient pas pour ambition de construire un ailleurs déconnecté du film et en partie fantasmé, mais bien d’interroger le traitement des limites de l’image et les jalons qu’elles proposent pour l’imaginaire du spectateur. Néanmoins, ses prises de position rappellent à juste titre que le traitement de l’invisible suppose toujours, au-delà des choix esthétiques, des choix idéologiques, voire politiques et qu’au-delà des débats théoriques, l’invisible est aussi un sujet de débats théologiques – que Louis Seguin aborde de manière frontale.

Ce tour d’horizon, qui ne prétend pas être exhaustif, permet d’envisager les porosités du hors-champ et du hors-scène en prenant appui sur leurs définitions et sur leurs soubassements théoriques et esthétiques.

Porosités

Le panorama esquissé dans la première partie a mis en avant le rôle du cadrage et le rôle du montage, dont le traitement définit la nature du hors-champ. Il importe de souligner que les conditions de perception diffèrent au cinéma : au théâtre la perception est localisée et le lieu théâtral a sa profondeur, tandis qu’au cinéma la profondeur est illusion, comme l’a montré Pascal Bonitzer dans Le champ aveugle :

L’écran n’est pas une fenêtre ouverte sur le monde, mais une surface d’enregistrement. La profondeur de champ n’est pas un horizon ouvert, c’est un agencement de plans. Le regard croit s’y enfoncer […], mais il ne fait en réalité que balayer une surface limitée – celle de l’écran – à partir d’un point de vue rigide et bloqué45.

Alors que le hors-scène théâtral en son sens le plus concret peut être, du moins dans certains cas, situé quelque part en périphérie du plateau, en coulisses ou « au lointain », le hors-champ n’a pas besoin de la profondeur pour exister. L’expérience du spectateur au cinéma et au théâtre diffère donc en raison de ces conditions de perception spécifiques – dans un cas, le regard est concentré sur la surface plane de l’écran, dans l’autre il se focalise sur le volume de la cage de scène mais fait moins abstraction de la salle et de ceux qui l’entourent. Du point de vue du cadrage, il importe donc d’éviter les comparaisons trop hâtives car c’est sur ce plan que l’écart entre théâtre et cinéma est le plus considérable.

Il en est autrement du montage. Cet autre procédé constitutif du hors-champ cinématographique se prête mieux que le cadrage à une comparaison avec les utilisations du montage au théâtre, à condition de bien noter qu’il ne s’agit pas d’un emprunt du théâtre au cinéma : dans l’introduction du numéro 204 de la revue Théâtre/Public, Marguerite Chabrol et Tiphaine Karsenti mettent en garde contre « le caractère supposément cinématographique du montage46 », dénoncé comme une idée reçue. L’enjeu sera alors pour nous d’identifier différents types de montage et de repérer, le cas échéant, des catégories transversales au théâtre et au cinéma. L’hybridation des arts ne doit pas nous faire perdre de vue l’hypothèse d’une influence du cinéma sur le théâtre, mais celle-ci ne repose pas seulement sur l’utilisation du montage : il faut relever certains usages du montage renvoyant plus spécifiquement au cinéma.

Plus précisément, dans le processus qu’est le montage, un élément retiendra particulièrement notre attention : la coupe. Il y a des manières de couper, et les choix opérés sont signifiants. Parallèlement au parcours des théoriciens du hors-champ, qui aboutit à l’ourlet, nous voudrions interroger la manière dont sont définies les limites de la représentation. Si l’on suit l’hypothèse d’une évolution parallèle du hors-champ et du hors-scène, le hors-scène pourrait bien lui aussi se déplacer de la périphérie au cœur de l’image à la manière de la « coupure irrationnelle » deleuzienne. De même que l’image cinématographique se trouve travaillée de nouvelles béances, l’image théâtrale pourrait être l’objet d’une transformation similaire, liée à une évolution des habitudes perceptives ; d’une mutation du regard désormais plus habitué aux sautes de temps et d’espace spécifiques au cinéma. L’apparition de ce médium fait partie des raisons contextuelles qui expliquent la recherche constante d’un « assoupli[ssement47] » de l’espace par les scénographes du XXe siècle, et cette souplesse s’inscrit déjà dans le texte de théâtre.

À l’échelle du texte : traces et influences du hors-champ cinématographique

Parmi les (nombreux) textes de théâtre contemporains explorant les effets de cadrage et/ou de mouvements de caméra à l’échelle des mots, je mentionnerai tout d’abord Par les routes de Noëlle Renaude48, réécriture parodique d’un road-movie qui prend la forme d’une « travers[é]e de l’hexagone par les petites routes49 ». La parole, non distribuée, y est de nature semi-didascalique et recrée un effet-travelling proche de la perception que l’on peut avoir depuis l’intérieur d’un véhicule.

Et vous quittez l’Île-de-France
Reviendrons-nous en Île-de-France ?
Des fraises 1000 m à gauche
Des fraises à 400 m
Des fraises à 100 m
Fraises
Super des fraises j’en prends un petit sac ?
Un petit sac
Nous avons un petit sac de fraises
Pour la route
Super
Attention enfants
Ici
Espace fleurs : mariage & deuil
Parking à 250 m
Parking
Écomarché
Loiret : l’esprit d’entreprise
Faut voir absolument le château de Meung
Gros-Bourg-en-Beauce
Tous nos Commerces & Nos Sapeurs-pompiers & Faites attention aux piétons50

Le paysage se dessine ainsi de manière toujours fragmentaire, donnant la sensation d’une trajectoire et créant des effets de gros plan (les fraises, les panneaux de signalisation) et des variations de vitesse ; une perception de type cinématographique empruntée au rythme du road-movie affleure, sans référence explicite à des mouvements de caméra. Ainsi s’élabore un hors-champ paysager qui se construit en référence au cinéma, et plus précisément à une modalité narrative relative à un certain type de montage, propre à un genre ici parodié.

Je te regarde d’Alexandra Badea51 (2015) s’intéresse aux dispositifs de surveillance et notamment aux caméras. Un robot connecté, Jazz, fait le lien entre un homme et une femme qui travaillent dans la même entreprise à deux extrémités du monde. Une gardienne de prison amoureuse d’un détenu utilise les caméras de surveillance pour l’approcher. Une femme pathologiquement jalouse surveille son mari avec toutes sortes de gadgets numériques. Un vigile d’aéroport s’inscrit en parallèle à un programme de surveillance des frontières.

1. Utilisateur W 1972-0701-1840-1

Je te regarde /
Derrière mon écran je te regarde /
Je te regarde sans savoir ce que je cherche dans ton regard
À dix mille kilomètres loin de toi je te regarde comme si tu étais dans la pièce à côté
Je lance l’option massage de mon fauteuil ergonomique
J’ouvre Jazz Connect et je pars à ta recherche /
Jazz marche
Je marche
Bien assis dans mon fauteuil qui me tripote doucement les épaules je traverse
les couloirs d’une entreprise paumée à l’autre bout du monde /
Les images défilent sur l’écran, j’ai appris le décor par cœur,
Entre moi et toi il y a trois couloirs et deux open space52/

Le regard médiatisé est ainsi inscrit à l’échelle de l’écriture même, à travers la présence cette fois explicite de caméras de diverses natures. Ainsi se dessine un univers dans lequel l’intime mis en spectacle se fait extime, où les relations interpersonnelles sont médiatisées sans qu’il y ait de rencontre effective entre les corps. L’effet de hors-champ repose cette fois sur le cadrage du regard, réalisé par des machines qui déterminent une relation – empêchée – au monde et aux autres.

En scène (1) : usages cinématographiques du montage

La mise en scène a intégré la fluidité de l’image cinématographique, ainsi qu’un certain type de montage qui y est associé. Elle a elle aussi ses « coupures irrationnelles », que Christoph Marthaler utilise avec une grande virtuosité dans Une île flottante53 : les distorsions temporelles sont orchestrées par la télécommande maniée par l’un des acteurs pour obtenir des pauses ou rejouer une séquence. La béance de ces coupures est telle qu’un personnage peut « rester bloqué dans un aparté » durant la totalité du spectacle, et avoir par conséquent un statut entre présence et absence. À travers cet usage des coupes et des ellipses, se dessine une zone d’interférences temporelles54 entre cinéma et arts de la scène, ce qui invite à postuler un paradigme temporel du hors-scène inspiré du hors-champ cinématographique. Dans sa mise en scène de Sauterelles de Biljana Srblanović (2007), Dominique Pitoiset a par exemple assuré les transitions entre des scènes se déroulant dans des lieux différents, au moyen d’un effet de travelling, mais ce n’est pas la caméra qui se déplace : les meubles glissent en coulisses pour indiquer le changement de lieu et laisser place à un nouvel intérieur.

Mettant lui aussi la mobilité de la scénographie au service du traitement du temps dans sa mise en scène de Retour à la citadelle de Jean-Luc Lagarce55, François Rancillac utilise la tournette comme outil de montage. Ce geste s’inscrit dans la filiation historique des recherches d’une scène cinétique et des expérimentations réalisées avec des plateaux tournants à partir de 189656 et poursuivies par Brecht. Cela permet au metteur en scène de faire apparaître ou disparaître des lieux à volonté, ou bien de faire rejouer deux fois la même scène en changeant la hiérarchisation des plans : les acteurs qui dialoguaient au premier plan passent à l’arrière-plan par le biais de la tournette et rejouent la scène en la mimant. Dans ce cas l’effet de hors-champ est temporel : le plateau tournant sert d’outil de montage, pour réaliser des effets de faux raccords.

Dans ces exemples, c’est moins à travers le cadrage qu’à travers le montage et plus précisément le traitement des coupes que peut se comprendre l’influence du hors-champ cinématographique sur le hors-scène théâtral : il s’agit moins d’un phénomène spatial que d’un phénomène temporel, qui a toute son importance dans l’organisation de la relation entre le visible et l’invisible.

En scène (2) : zones liminaires, à la croisée du hors-scène et du hors-champ

Les coulisses, zones liminaires premières du théâtre, peuvent être filmées et donc replacés au cœur de la scène. Le procédé a marqué les esprits notamment dans la mise en scène du Misanthrope par le flamand Ivo van Hove (Berlin, Schaubühne, 2010) : dans cette transposition moderne de la pièce de Molière dans un loft ultra-moderne, une fenêtre-écran de projection vidéo permet à plusieurs reprises de donner à voir un extérieur, un hors-scène qui se confond avec les coulisses : Alceste et Célimène se disputent dans les couloirs du théâtre puis sortent, et Célimène appelle un taxi. Ce procédé trouve une variation plus troublante dans Hearing : l’exploration vacillante des coulisses filmées en direct par les actrices du spectacle de l’iranien Amir Reza Koohestani57 met en jeu l’espace périphérique de la représentation sans pour autant le dévoiler, à l’aide d’une caméra-prothèse qui peut être posée devant l’œil des comédiennes pour relayer leur point de vue, simultanément projeté à l’arrière-plan. Ici la vision des coulisses renforce la stratification fictionnelle et temporelle de cette histoire qui se construit sur la lisière du fantastique : dans un internat de jeunes filles, on suspecte une présence masculine fantomatique qui aurait été seulement entendue – hearing. Les coulisses ont alors la double valeur d’un relais vers le monde réel, et d’un hors-champ inquiétant, filmé par une caméra qui tangue au gré de la marche haletante de l’actrice qui la porte.

À la croisée du hors-scène et du hors-champ, on peut citer My Revolution is Better Than Yours de Sanja Mitrović58, spectacle en partie inspiré du film Viva Maria de Louis Malle (1965) dans lequel Brigitte Bardot et Jeanne Moreau incarnent deux visions de la révolution. Variation sur ce thème, le spectacle présente les regards sur la révolution des acteurs-performeurs qui parlent en leur propre nom et racontent des souvenirs personnels, montrant ainsi comment intime et politique se croisent. La démarche n’est pas sans liens avec le théâtre documentaire tel que le définit Peter Weiss : une représentation à valeur d’enquête, fondée sur la sélection et le montage de matériaux prélevés à même la réalité, et qui vise à éclairer une question d’intérêt général, d’ordre social ou politique. Paradoxalement ici la mise en scène du tournage est au service d’une hyperthéâtralisation des entrées et des sorties – sorties non pas de scène, mais du champ de la caméra située à cour, devant laquelle les acteurs vont se placer à tour de rôle. Les différentes modalités de cadrage utilisées focalisent le regard sur différentes zones du plateau, rendant très souple notre perception de la scénographie, polarisant ou dépolarisant notre attention et créant un redoublement de l’entrée en scène lorsque le comédien entre dans le champ. L’espace scénique visible devient ainsi le hors-champ de l’écran, selon un système de hiérarchisation du point de vue.

On observe un procédé similaire – mais avec un tout autre univers scénographique et d’autres implications esthétiques – dans 2666, adaptation du roman de Roberto Bolaño par Julien Gosselin59 – mais cette fois, la scénographie d’Hubert Colas prend le pas sur les acteurs. Les cinq parties de ce spectacle-fleuve d’une durée totale de douze heures sont des variations scénographiques sur les possibilités d’une boîte – une structure qui se déploie ou se referme pour faire exister les différents lieux de la fiction, jusqu’à la disparition quasi-totale des acteurs durant une séquence qui se déroule dans une boîte de nuit. Des zones de visibilité intermédiaire/problématique échappent au regard et tout est fait pour que l’on ait une vision fragmentaire de la scène, par un travail de montage qui reconfigure sans cesse notre point de vue. La zone liminaire se déplace parfois au cœur du plateau, notamment dans la scène de la boîte de nuit qui croise hors-scène (zone non visible) et hors-champ (zone extérieure au cadre de la caméra). La trilogie Joueurs, Mao II, Les Noms60 qu’il a récemment adaptée de trois romans de Don DeLillo déploie le même langage visuel en le systématisant : dans le premier volet, Joueurs, les acteurs ne sont visibles qu’à l’écran, sauf lorsque deux d’entre eux souhaitant ironiquement « aller dehors » ouvrent une porte donnant sur l’avant-scène tandis qu’une caméra les filme de dos, montrant ainsi les spectateurs qui leur font face. La cage de scène n’est accessible aux regards qu’à travers la vision qu’en donne la caméra et à travers la surface du panneau qui la dissimule, devenant au gré de l’éclairage mur opaque ou vitre transparente derrière laquelle les acteurs évoluent. La relation au plateau de théâtre est donc médiatisée par un écran dont la scène devient le hors-champ – et il s’agit dans ce cas d’un hors-champ fluide, sans cesse quadrillé par des caméras fixes ou mobiles dont les emplacements sont variables. La cage de scène, traditionnellement dédiée à la focalisation des regards, devient une zone liminaire où s’organise la friction et/ou la fusion du hors-scène et du hors-champ.

Le procédé utilisé dans Festen61, performance filmique du collectif MxM réalisée par Cyril Teste et adaptatée du film de Thomas Vinterberg, est une autre variante de ces scènes intermédiales aux contours réinventés. La performance filmique que le collectif a choisi de pratiquer est définie de manière succincte comme « un dialogue entre le cinéma et le théâtre », avec une charte de création très précise supposant notamment qu’elle « doit être tournée, montée et réalisée en temps réel sous les yeux du public », que « [l]es images préenregistrées ne doivent pas dépasser 5 minutes et sont uniquement utilisées pour des raisons pratiques à la performance filmique » et que « [l]e temps du film correspond au temps du tournage62 ». Dans une interview relative à Festen, Cyril Teste explique en ces termes comment théâtre et film se rencontrent dans sa pratique :

La performance filmique est un dialogue entre le cinéma et le théâtre, […] mais on a également à travers le théâtre le hors-champ de ce film, c’est-à-dire tout ce qui se produit en dehors du cadre, et du coup le spectateur peut osciller entre les deux lectures et se faire sa propre lecture63.

Insistant sur l’importance du fait que les acteurs eux-mêmes n’ont pas toujours conscience d’être regardés, il ajoute :

C’est ça toute la question aussi dans Festen : qu’est-ce qu’on donne à voir et qu’est-ce qu’on ne donne pas à voir ? Qu’est-ce qui est de l’ordre de la vérité et qu’est-ce qui est de l’ordre du non-dit64 ?

Dans ce spectacle tout particulièrement, le collectif MxM atteint une vraie souplesse dans le traitement de la zone liminaire de la représentation, toujours d’une grande plasticité – et qui a en même temps des échos très significatifs avec le non-dit de l’inceste, important ici. La scénographie ménage des zones du plateau qui échappent au regard et comporte des décors conçus pour être uniquement relayés par les caméras, ce qui crée un dispositif qu’on perçoit de manière différente au gré des mouvements de caméra.

Distinguer hors-scène et hors-champ est donc nécessaire si l’on veut mieux repérer les porosités de ces deux catégories. Penser la scène en volume et tenir compte de la dimension tridimensionnelle d’une image théâtrale, qui peut être travaillée avec les procédés du cadrage ou du montage, permet au terme de cette étude d’identifier une catégorie de hors-scène singulière qui repose sur des effets de hors-champ. Quant à cette zone liminaire aux frontières instables qui se dessine dans certains spectacles contemporains, elle semble rejouer la « coupure irrationnelle » deleuzienne et inviter à des entrecroisements multiples de l’image théâtrale, de son environnement immédiat et du monde. Elle contribue par ailleurs à remettre en question la nature de la fiction : être spectateur à la fois du film et du tournage rejoue les rapports du théâtre et du réel, et apparaît être l’une des modalités de l’entre-deux du théâtral et du performatif65 qui se cherche sur les scènes contemporaines.

Notes

1 Cette affirmation prend appui sur une enquête réalisée dans le cadre d’une thèse (Aurélie Coulon, Mises en jeu du hors-scène dans le théâtre de Marguerite Duras, Bernard-Marie Koltès et Jean-Luc Lagarce : approche dramaturgique et scénographique, thèse de doctorat en Arts du spectacle, sous la direction de Luc Boucris, Université Grenoble Alpes, 2016). Retour au texte

2 Jean-Pierre Sarrazac, « Devenir scénique », in Jean-Pierre Sarrazac (dir.), Lexique du drame moderne et contemporain, Belval, Circé, 2001, pp. 38-40. Retour au texte

3 Arnaud Rykner, « hors-scène », in Les mots du théâtre, Toulouse, PU du Mirail, 2010, p. 51. Retour au texte

4 Ibid., p. 53. Retour au texte

5 Pour une approche historique du hors-scène, voir Léonor Delaunay (dir.), « Les coulisses théâtrales. Contribution à une histoire du hors-scène », Revue d’Histoire du Théâtre, n° 281, 2019. Retour au texte

6 Patrice Pavis, Dictionnaire du théâtre, Paris, Armand-Colin, 2009 [1996], p. 163. Cet ouvrage est à ma connaissance le premier dictionnaire spécialisé à répertorier une entrée « hors-scène ». Le lexique d’Arnaud Rykner, Les mots du théâtre, référence également le mot. En revanche, il est absent du Dictionnaire encyclopédique du théâtre. Voir Michel Corvin (dir.), Dictionnaire encyclopédique du théâtre à travers le monde, Paris, Bordas, 2008, et Arnaud Rykner, Les mots du théâtre, op. cit. Retour au texte

7 Patrice Pavis, Dictionnaire du théâtre, op. cit., p. 163. Retour au texte

8 Patrice Pavis définit la teichoscopie comme un « moyen dramaturgique pour faire décrire par un personnage ce qui se passe en coulisses dans l’instant même où l’observateur en fait le récit. », Ibid., p. 346. Retour au texte

9 Anne Ubersfeld, Lire le théâtre I, Paris, Belin, 1996 [1977], p. 140. Retour au texte

10 Michael Issacharoff, Le spectacle du discours, Paris, José Corti, 1985, pp. 85-95. Retour au texte

11 David Ball et Catherine Bénac (dir.), Coulisses, n° 44, Besançon, PU de Franche-Comté, printemps 2012. Cette publication fait suite à la journée d’études « L’envers du théâtre : enjeux et mises en jeu du hors-scène » (Université Paris 3 – Sorbonne-Nouvelle, 13 mai 2010). Retour au texte

12 Voir Arnaud Rykner, Paroles perdues, faillite du langage et représentation, Paris, José Corti, Les Essais, 2000 et « La scène sans la scène (mettre en scène, mettre hors-scène) », in Marie-Thérèse Mathet (dir.), La scène, littérature et arts visuels, Paris, L’Harmattan, 2001, pp.193-211. Arnaud Rykner propose également une définition du hors-scène qui donne un point de vue historique sur la notion dans l’abécédaire Les mots du théâtre, Ibid., pp. 51-54. Retour au texte

13 Arnaud Rykner, « La scène sans la scène (mettre en scène, mettre hors-scène) », op. cit., p. 193. Retour au texte

14 Ibid., p. 22. Retour au texte

15 « La découverte désigne l’écart dans un décor qui laisse voir la coulisse mais aussi le cache – toile peinte ou châssis, placé là pour occulter voire pour exploiter la faille, en simulant un hors-champ, un “ au-delà de la scène ”. » Chantal Guinebault-Szlamowicz, « Cadre, cadrage, hors-cadre », in Luc Boucris, Jean-François Dusigne et Romain Fohr (dir.), Scénographie : 40 ans de création, Montpellier, L’Entretemps, 2010, pp. 54-60, p. 54. Retour au texte

16 Bernard Dort, « Le texte et la scène : pour une nouvelle alliance », in Le spectateur en dialogue, Paris, P.O.L., 1995, pp. 244-274, p. 253. Retour au texte

17 Ibid. Retour au texte

18 Arnaud Rykner, Paroles perdues, op. cit., p. 260. Retour au texte

19 John Russell Brown, « On-stage action and off-stage space », in Christine Hamon-Siréjols et Anne Surgers (dir.), Théâtre : espace sonore, espace visuel, Lyon, PUL, 2003, pp. 11-22. Retour au texte

20 Jean-Pierre Faye, « L’autour et l’ici », in Cahiers de la compagnie Madeleine Renaud – Jean-Louis Barrault, n° 46, octobre 1964, pp. 42-51. Retour au texte

21 Pierre Francastel, « Le théâtre est-il un art visuel ? », in Denis Bablet et Jean Jacquot (dir.), Le lieu théâtral dans la société moderne, Paris, Éditions du CNRS, 1963, pp. 77-83, p. 78. Retour au texte

22 Ibid. Retour au texte

23 Chantal Guinebault-Szlamowicz utilise également le mot « hors-champ » dans l’article « Cadre, cadrage, hors-cadre », in Luc Boucris, Jean-François Dusigne et Romain Fohr (dir.), Scénographie : 40 ans de création, op. cit., p. 54. Retour au texte

24 Jean-Christophe Bailly, « Persistance du champ », in Poursuites, Paris, Christian Bourgois éditeur, 2003, pp. 89-106, pp. 95-96. Retour au texte

25 Patrice Pavis, L’analyse des spectacles : théâtre, mime, danse, danse-théâtre, cinéma, Paris, Nathan, 1996, p. 140. Retour au texte

26 Ibid. Retour au texte

27 Ibid. Retour au texte

28 Léo Ramseyer, « Louis Seguin et la question du hors-champ : une cartographie de l’espace du cinéma », in Décadrages, n° 1-2, 2003, mis en ligne le 01 octobre 2004, http://decadrages.revues.org/590. Retour au texte

29 Marie-Thérèse Journot, Le vocabulaire du cinéma, 2e édition, Paris, Armand Colin, 2010 [2008]. Retour au texte

30 Ibid., pp. 129-178. Retour au texte

31 Ibid., pp. 187-192. Retour au texte

32 Ibid., pp. 9-17. Retour au texte

33 André Bazin, Qu’est-ce que le cinéma ?, Paris, Les Éditions du Cerf, coll. 7e art, 2011 [1987], p. 160. Retour au texte

34 Pascal Bonitzer, « Hors-champ (un espace en défaut) » in Cahiers du cinéma, n° 234-235, numéro spécial, 1971-72, pp. 15-26. Retour au texte

35 Pascal Bonitzer, Le regard et la voix, Christian Bourgois, 1976, p. 14. Retour au texte

36 Ibid., pp. 14-15. Retour au texte

37 Pascal Bonitzer, Le regard et la voix, op. cit., pp. 14-15. Retour au texte

38 Luc Boucris, L’espace en scène, Paris, Librairie théâtrale, 1993, p. 21. Retour au texte

39 Pascal Bonitzer, Le regard et la voix, op. cit., p. 22. Retour au texte

40 Gilles, Deleuze Cinéma 1 : l’image-mouvement, Paris, Minuit, 1983, p. 29. Retour au texte

41 Gilles Deleuze, Cinéma 2 : l’image-temps, Paris, Minuit, 1985, p. 324. Retour au texte

42 Jacques Rancière, « D’une image à l’autre ? Deleuze et les âges du cinéma », in La fable cinématographique, Paris, Seuil, 2001, pp. 145-165, p. 159. Retour au texte

43 Ibid. Retour au texte

44 Gilles Deleuze, Cinéma 2 : l’image-temps, op. cit., pp. 346-47. Retour au texte

45 Pascal Bonitzer, Le champ aveugle, op. cit., p. 118. Retour au texte

46 Marguerite Chabrol et Tiphaine Karsenti (dir.), Entre théâtre et cinéma : recherches, inventions, expérimentations, Théâtre/publici, n° 204, juin 2012, p. 5. Retour au texte

47 Luc Boucris, L’espace en scène, op. cit., p. 21. Retour au texte

48 Noëlle Renaude, Par les routes : des écritures dans l’espace, Paris, Théâtre ouvert, 2005. Retour au texte

49 Ibid., p. 55. Retour au texte

50 Ibid., pp. 12-13. Retour au texte

51 Alexandra Badea, Je te regarde, in Je te regarde, Europe connexion, Extrêmophile, Paris, l’Arche, 2015, pp. 7-63. Retour au texte

52 Ibid., p. 9. Retour au texte

53 Das Weise vom Ei (Une île flottante), mise en scène de Christoph Marthaler d’après Eugène Labiche, création le 21 décembre 2013 à Bâle (Theater Basel). Retour au texte

54 Cette formule est utilisée en référence au titre du colloque organisé à l’Université de Grenoble les 26 et 27 février 2015, « Cinéma et arts de la scène : interférences temporelles » (LITT&ARTSs/ Cinesthéa). Retour au texte

55 Lecture en 1990 à Théâtre Ouvert (Paris), création le 16 octobre 2007 à la Comédie de Saint-Étienne. Retour au texte

56 Claudine Amiard-Chevrel, Théâtre et cinéma années vingt, tome I, Giromagny, L’âge d’homme, 1990. Retour au texte

57 Création le 15 juillet 2015 au Charsou Hall, City Theatre (Téhéran). Retour au texte

58 Création le 17 octobre 2018 au Maillon (Strasbourg). Retour au texte

59 Création le 18 juin 2016 au Phénix (Valenciennes). Retour au texte

60 Création le 7 juillet 2018 au Festival d’Avignon. Retour au texte

61 Création le 7 novembre 2017 à Bonlieu Scène Nationale (Annecy). Retour au texte

62 Site internet du collectif MxM, http://www.collectifmxm.com/category/performances-filmiques/. Retour au texte

63 Retranscription d’une interview vidéo de Cyril Teste, https://vimeo.com/236740995. Retour au texte

64 Ibid. Retour au texte

65 En suivant Joseph Danan, qui considère « l’accomplissement d’une action réelle, sans mimèsis » comme un critère définitoire majeur du performatif. Joseph Danan, Entre théâtre et performance : la question du texte, Arles, Actes Sud-Papiers, 2016, p. 23. Retour au texte

Citer cet article

Référence électronique

Aurélie Coulon, « Porosités du hors-scène et du hors-champ au théâtre : zones liminaires », Motifs [En ligne], 4 | 2021, mis en ligne le 01 janvier 2021, consulté le 27 novembre 2024. URL : https://lodelpreprod.univ-rennes2.fr/blank/index.php?id=421

Auteur

Aurélie Coulon

Université de Strasbourg

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